mardi 26 février 2013

Pour que nos communes résistent aux politiques répressives en matière d’asile et d’immigration

Lors de la prochaine réunion de la Communauté Urbaine du Centre (CUC) (date à, confirmer), plusieurs partenaires de la marche des migrants interpelleront les bourgmestres de la Communauté Urbaine du Centre (CUC) sur base de la lettre ci-dessous. Une pétition est disponible en téléchargement ici pour que cette interpellation soit formellement appuyée par des habitant-e-s de la région.


Monsieur Le Président de la Communauté Urbaine du Centre, Madame et Messieurs les Bourgmestres, 

Concerne : participation des administrations communales aux politiques répressives en matière d’asile et d’immigration.



Nous sommes interloqués par l’utilisation faite par certaines administrations communales des données administratives des citoyens qui recourent à ce service public pour l’un ou l’autre motif. Les mesures du gouvernement fédéral en matière d’asile et d’immigration impliquent que les communes doivent systématiquement renseigner à l’Office des Etrangers les personnes qui ont reçu un ordre de quitter le territoire arrivé à terme et dont elles ont connaissance. En outre, si ces personnes se présentent dans une administration communale, les administrations ont, sans y être obligées jusqu’à présent, la possibilité légale d’actionner les opérations qui permettront leur arrestation par la police pour placement dans un centre fermé en vue d’une expulsion. 



Ces procédures permettent de mettre en application le plus systématiquement possible un ordre de quitter le territoire suite à une demande d’asile ou de régularisation négative, un regroupement familial négatif ou à la fin d’un séjour d’étudiant. Ces pratiques renforcent ainsi une politique répressive envers les migrants qui n’ont pourtant commis aucun autre délit que de se retrouver sur le territoire sans y bénéficier de droit de séjour, malgré qu’ils aient parfois démontré la réussite de leur intégration dans notre pays. La politique « d’immigration choisie » adoptée par le gouvernement implique que ces personnes soient davantage traitées comme des variables économiques que comme des êtres humains et c’est évidemment inacceptable. Nous sommes d’autant plus choqués que les pouvoirs communaux participent activement à cette politique -et visiblement pour certains sans que ça ne leur pose problème- alors qu’ils sont pourtant au plus près des citoyens et peuvent constater tous les jours les effets désastreux de ces pratiques. 



Le croisement des données permet le resserrement du contrôle des migrants. Sont concernés autant les étrangers extra-européens qu’européens. Selon la secrétaire d’Etat pour l’asile et l’immigration, 1.224 européens ont été priés de quitter le territoire entre janvier et août 2012 au motif que ces personnes étaient des "charges déraisonnables pour le système d’aide sociale" (1). Entre mi-2011 et fin 2012, depuis que les CPAS et les autorité fédérales échangent systématiquement leurs données, 2.907 permis de séjour ont été retirés à des Européens "qui abusaient du CPAS"(2). Ces pratiques montrent de manière évidente que les droits à l’asile, au regroupement familial, à la liberté de circulation, à l’accès à l’aide sociale et aux possibilités de régularisation sont sur la sellette et de plus en plus remis en question. 

Alors qu’il n’y a pas actuellement d’obligation absolue de confiscation du passeport et de dénonciation à la police, nous avons été interpellés à plusieurs reprises à propos de situations où, suite à un simple passage dans l’une ou l’autre commune de la région, des personnes ont directement été arrêtées sur place pour être ensuite emmenées dans un centre fermé en vue d’une expulsion du territoire. 

Vu ces faits qui semblent se multiplier, nos craintes d’accentuation de ces politiques répressives grandissent quand nous savons qu’une expérience pilote, menée dans quatre villes du pays, permettra, si elle entre en vigueur comme prévu, de contraindre les communes à davantage de démarches proactives dans ce domaine. Les communes devront d’elles-mêmes assurer une traçabilité des migrants et convoquer toute personne ayant reçu un ordre de quitter le territoire pour entamer une procédure d’information sur le retour volontaire. Au bout de cette procédure, en cas de refus de retour volontaire, les communes devront se charger des démarches en vue de l’expulsion de ces personnes avec interdiction de revenir en Belgique avant cinq ans. 

De 2006 à décembre 2008, les villes regroupées au sein de la CUC, et particulièrement la commune de La Louvière, avaient montré une relative solidarité avec le combat pour la régularisation des sans-papiers. Vous n’êtes pas sans savoir les drames humains, sociaux, personnels et familiaux que les arrestations et les expulsions occasionnent à chaque fois. La plupart du temps, elles touchent des gens qui vivent chez nous, dans nos communes, depuis plusieurs années. Elles touchent des familles dont les enfants vont à l’école avec les nôtres, des voisins, des collègues de travail ou des collègues de formation. Elles peuvent toucher des travailleurs qui ont cotisé à la Sécurité Sociale et contribué au développement économique de la Belgique et de nos villes. 

Les politiques fédérales actuelles imposent une série de procédures aux communes. Mais ces dernières disposent encore d’une certaine marge de manœuvre pour s’y conformer, avec plus ou moins de zèle. Nous savons d’ailleurs que plusieurs villes du pays ont décidé de ne faire que le minimum à cet égard et, au contraire, de tenter de faciliter au mieux les procédures pour les personnes en demande d’asile ou de régularisation qui vivent sur leur territoire. 

Vu que les obligations légales actuelles vous le permettent, nous vous demandons de généraliser cette pratique de solidarité et d’humanité, en donnant des instructions en ce sens au personnel communal, en particulier aux agents affectés au service des étrangers. Nous restons mobilisés et vigilants pour dénoncer publiquement tout excès de zèle dans la collaboration des administrations communales avec les politiques d’asile et d’immigration actuelles. 

Parce que nous pensons que le service public communal doit rester au service de tous les citoyens, nous demandons aux communes de la CUC de prendre une position de principe affichant ouvertement le refus de l’ensemble des procédures qui renforcent les politiques répressives à l’égard des migrants. 

En tant qu’associations et citoyens de la région du Centre, nous demandons aux communes de la CUC de faire connaitre publiquement leur position dans les semaines qui viennent, tant auprès du gouvernement fédéral qu’auprès des citoyens. 

En vous remerciant pour l’attention portée à ce courrier et en attendant votre réponse, recevez, Monsieur le Président de la CUC, Madame et Messieurs les Bourgmestres, l’expression de nos sentiments les meilleurs. 

(1) La Libre Belgique, 02/08/2012
(2) www.rtl.be, 15/01/2013

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