mardi 23 avril 2013

La marche des migrants, c'était comment? Retour sur le vendredi soir

La marche des migrants de la région du Centre de ces 19 et 20 avril a été un beau succès! Bravo à toutes et tous! Près de 250 personnes à l'église et dans le cortège, sans compter celles et ceux qui se sont joints à nous pour le débat de vendredi soir, ou le samedi à Bois-du-Luc et à la maison des associations! Forts de cette action réussie, nous n'en restons pas là. Une réunion de bilan va être programmée pour décider de la suite de la mobilisation. Pour être tenu-e au courant, écrire à asblcepre@hotmail.com ou téléphoner au 064/23.72.90. 

Dans les jours à venir, vous retrouverez comptes-rendu, photos et des vidéos sur notre blog. Commençons par un retour sur le vendredi soir, avec l'accueil à la gare de la marche de solidarité avec ET sans papiers, le souper-spaghetti à La Braise Culture et le débat sur les convergences à renforcer entre les luttes des travailleurs sans emploi et sans papiers...


Vendredi 19 avril. Ca commence aujourd’hui ! Du côté de l’équipe de l'asbl CEPRé qui coordonne la plateforme organisatrice, ça s’agite. On prépare le matériel à transporter jusqu’aux différents lieux où se dérouleront les étapes de la marche. Dernières impressions de documents, dernières vérifications du planning, derniers coup de fil aux partenaires de la plateforme pour s’assurer que tout roule de leur côté. 

A 15h, direction le café de la superbe salle Adamo à Bois-du-Luc pour récupérer les clés, préparer l’exposition sur l’histoire de l’immigration avec les collègues du Ceraic et remplir les frigo des boissons avec les Comité de solidarité avec le peuple chilien. Pendant ce temps-là, le reste de la plateforme de la marche des migrants de la région du Centre assemble le matériel qui sera installé le lendemain matin à la maison des associations et découvre qu’il est impossible de décorer l’église comme on pensait le faire parce qu’un concert s’y organise ce vendredi soir… on fait avec et on verra demain! Un imprévu en entraînant un autre, les amis de la marche de solidarité avec ET sans papiers nous annoncent par téléphone qu’ils arriveront à une cinquantaine de personnes, 15 minutes plus tôt à la gare de La Louvière sud… Plus le temps de prévenir les autres. Ils sont donc accueillis par des membres de la plateforme qui arrivent petit à petit. Mais, en bonne synchro avec la météo, la pluie a cessé. C’est déjà de bonne augure pour le lendemain ! 

Sur le parking de la gare, des visages connus se retrouvent. D’autres se découvrent. « Bienvenue ! Contents de vous avoir ici avec nous ! ». Pour les marcheurs qui ont traversé la Belgique depuis le 6 avril, La Louvière est la dernière étape. Ils ont l’habitude et ont prévu une camionnette pour transporter les sacs jusqu’à la salle omnisport de la rue de Bouvy que la ville a mis à notre disposition pour passer les nuits de vendredi et samedi. Ensemble, nous nous mettons en route en longeant les voies de chemin de fer. Petite visite touristique improvisée: «Les collines, là, ça s’appelle des terrils. Ce sont les traces que les charbonnages ont laissé un peu partout à travers le paysage de la région. Ca nous rappelle notre histoire collective. Ici, beaucoup sont descendants de mineurs. Beaucoup sont des enfants d’immigrés venus se tuer au travail dans les mines.» 

Arrivés à la salle omnisport, c’est d’abord un peu le foutoir pour s’y retrouver. Le gardien n’est pas vraiment au courant de notre séjour. Une fois qu’on s’est arrangés pour les clés et qu’on a repéré les lieux, nous organisons une première assemblée, en traduction simultanée vers l’anglais et l’arabe, pour expliquer les objectifs de la marche des migrants de la région du Centre sur laquelle travaillent depuis septembre une quinzaine d’associations et plusieurs habitants de la région. Nous réglons aussi les points pratiques: comment on organise la bouffe? où laisse-t-on les sacs pendant la journée? Comment s’articule le programme? 

Vers 18h, le groupe se met en route vers la salle de La Braise Culture que nous découvrons joliment décorée d’empreintes de pas. Ca sent bon depuis les cuisines. Nous nous installons et les premières assiette de spaghetti bolognaise arrivent déjà. Les marcheurs ont reçu un ticket à échanger contre une assiette et une boisson. Les personnes qui le peuvent sont invitées à payer leur entrée pour rentrer dans les frais. La salle se remplit doucement. Nous devons être environ 120 quand, le ventre plein, nous commençons la soirée-débat. 

Nous avons choisi de discuter des convergences à établir ou renforcer entre les luttes des travailleurs sans emploi et des travailleurs sans papiers. Un participant de la marche de solidarité avec ET sans papiers commence par expliquer la dynamique qu’ils ont lancée : rencontrer les personnes qui se mobilisent dans différentes villes de Belgique pour partager des expériences, réfléchir ensemble aux modes d’actions et aux revendications à porter, tout ça pour essayer de relancer un mouvement national de résistance à la politique «l’immigration choisie» et tout ce qu’elle implique comme drames sociaux. Ensuite, Freddy Bouchez explique la mobilisation du groupe des travailleurs sans emploi de l’asbl CEPRé ces derniers mois, avec les revendications élaborées et les actions entreprises pour lutter contre la «chasse aux chômeurs», encore renforcée par les dernières réformes sous prétexte d’une «austérité nécessaire». 

Pour lancer la discussion, nous avions prévu deux vidéos : la première sur les conditions de travail des personnes sans papiers, avec «On bosse ici ! On vit ici ! On reste ici !», un court métrage réalisé en 2010 en France par le Collectif des cinéastes pour les sans papiers, ainsi que des extraits du documentaire « ans papiers au travail», réalisé en 2007 par la commission syndicale de l’Udep Bruxelles. La deuxième vidéo rassemblait des témoignages de travailleurs sans emploi, avec des extraits de «Chômeurs malgré eux», réalisé par la FUNOC à Charleroi en 2011. Malheureusement, les conditions techniques ont rendu ces documentaires difficilement audibles. 

Pas trop grave finalement puisque le débat, qui se poursuit à micro ouvert, a été très riche, avec plusieurs témoignages complémentaires, constructifs et enthousiasmants. Des réalités de vie similaires ont été soulignées entre les travailleurs sans emploi et sans papiers. Tous doivent accepter n’importe quel boulot pour survivre, sans quoi les premiers risquent une sanction de l’Onem qui les prive de tout revenu et les seconds, qui n’ont déjà pas de revenu, risquent tout bonnement de crever de faim. Le travail au noir est la seule issue pour beaucoup. C’est une obligation pour les personnes sans papiers qui n’ont pas de permis de travail, ainsi que pour beaucoup de personnes sans emploi qui ne trouvent pas de travail déclaré et ne parviennent pas à boucler les fins de mois. Dans les deux cas, les dangers sont grands, tant au niveau des conditions de travail (sécurité, salaire, temps de travail, …) qu’en cas de contrôle qui peut aboutir à une expulsion pour un travailleur sans papiers ou une suspension des allocations avec obligation de remboursement des montants déjà perçus pour un travailleur sans emploi. Quant aux préjugés, ils sont aussi violents sur les travailleurs sans emploi que sur les travailleurs sans papiers : parasites, profiteurs, feignants, … Travailleurs sans emploi et sans papiers sont ainsi les boucs-émissaire d’une précarité qui se généralise à l’ensemble des travailleurs dans un système qui fonctionne sur la division et la mise en concurrence (actifs>< non actifs ; belges >< étrangers ; hommes >< femmes ; jeunes >< vieux ; ...). 

Au-delà des constats sur ces situations vécues finalement fort proches, des pistes d’alternatives ont été évoquées : l’occupation de logement ; la création de coopératives ; la répartition des richesses pour la création d’emplois publics et le refinancement des cpas ; le droit au travail pour toutes et tous, avec un vrai contrat en CDI, une réduction des temps de travail généralisée et un bon salaire ; le contrôle des loyers contre les propriétaires profiteurs et marchands de sommeil ; … Autant de pistes qu’il nous reste à creuser ensemble et autour desquelles nous avons à nous battre ensemble. Aussi, le groupe des travailleurs sans emploi de l’asbl CEPRé a invité les marcheurs à participer à leur prochaine assemblée, le 30 avril, à 9h, à la rue H. Aubry, 23, Haie St Paul) pour commencer à concrétiser tout ça. Après ce débat qui transpirait la solidarité, la volonté de part et d’autre de faire cause commune, les marcheurs ont entonné la chanson de la marche : «Travail au noir, mariage blanc, Où va ma vie, en attendant? Travail au noir, mariage blanc, en attendant, c’est pas marrant….». De bons frissons pour terminer cette soirée en poursuivant les discussions autour du bar.

La suite, le samedi 20 avril, ici.










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